CITIZENFOUR : un héros très discret

En 2013, Edward Snowden contacte anonymement la documentariste Laura Poitras et le journaliste du Guardian Glenn Greenwald pour révéler un véritable scandale : le programme de surveillance organisé par la NSA concernerait des millions d’individus partout dans le monde. Poitras et Greenwald ont en commun d’être membres fondateurs de la Freedom of the Press Foundation et rejoignent ensemble Snowden à Hong Kong après une correspondance sécurisée de plusieurs semaines. Depuis tout le monde connait l’histoire. Le film est un retour en arrière sur les jours précédents l’annonce pour le moins choc d’un homme dont on ne connait rien. On le découvre en temps réel dans sa chambre d’hôtel, lunettes sur le nez, tshirt banc assis en tailleur sur son lit prêt à révéler au monde ce qu’il sait. La première impression, c’est l’étonnement face à sa jeunesse. Et puis Snowden se met à parler, à raconter, à analyser, à prouver ses dires et l’on se dit que l’homme, en plus d’être très brillant, est formidablement discret. Snowden pèse ses mots, réfléchit sans en rajouter, parle posément sans jamais chercher à se faire valoir. Il ne souhaite d’ailleurs pas apparaitre comme celui qui se sacrifie pour le bien commun. Ce qui étonne dans ce film et qui nous touche, c’est l’évidence de sa démarche, sa détermination à choisir un monde meilleur, son choix de défendre des valeurs de liberté et de vie privée envers et contre tous.

Laura Poitras parvient à nous faire revivre de façon prodigieuse ces quelques heures avant que la vie d’un homme bascule vers une hypermédiatisation et devienne l’homme le plus recherché des Etats Unis. Les interviews en huis clos dans la chambre sont filmées dans une sérénité à l’opposé du choc médiatique qui va suivre et en cela le film montre très bien le mécanisme via lequel un évènement est mis en avant, l’effervescence qui suit l’annonce, les mobilisations qui se mettent en place, comme un roulement parfaitement huilé où tout semble possible parce que la machine collective se rassemble dans un élan solidaire. La meilleure réponse à l’orchestration diabolique de cette surveillance est bien ce ballet que forment soudain toutes ces personnes autour du néo-héros Snowden et qui laisse entrevoir une forme d’espoir face au machiavélisme qui nous écrase mais ne nous annihile pas. Pas encore.

Depuis Snowden est exilé en Russie qui n’a pas d’accord d’extradition avec les Etats Unis. Le film s’achève sur ce plan magnifique où on le voit avec sa compagne venue le rejoindre dans son isba, en train de cuisiner ensemble. La caméra les filme de l’extérieur et ils semblent être sous surveillance. Mais une surveillance bienveillante et choisie. Libres.

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