HAPPY NEW YEAR 2018 !

Nouvelle année, nouvelle cuvée ! On l’espère toujours meilleure que la précédente mais on a souvent tendance à occulter trop vite les évènements passés. On le comprend aisément tant il est plus doux de ne se remémorer que les bons souvenirs. Mais j’ai quand même envie de dire que 2017 ce n’était pas si chouette, vive 2018 (l’espoir fait vivre) !

Rien de bien neuf pourtant, la classique destruction de la planète, la trop répandue évasion fiscale, la présidence de Trump, les promesses non tenues, l’écart qui se creuse…. La disparition de Jeanne Moreau, de Jean Rochefort et Danielle Darrieux. De Harry Dean Stanton, de Frank Vincent, de Mireille Darc, de Claude Rich, de Sam Shepard, de Roger Moore, de John Hurt, de Simone Veil bien sûr ou de Victor Lanoux (bah oui aussi). Et puis notre Johnny Hallyday national. Je dis « notre » mais ça n’a jamais été le mien. Heureusement il nous reste les films pour rêver, résister, comprendre et vivre.

Voici donc mes voeux, pas très gais dans ses 3 premières minutes mais je n’y peux rien c’est le monde qui veut ça. La suite est belle. Elle s’appelle Jeanne.

ARRAS FILM FESTIVAL 2017 : programme de cette 18ème édition

Ce soir s’ouvre la 18ème édition du Arras Film Festival avec la projection de Jalouse de David Foenkinos. Au programme : des rétrospectives, des hommages, du cinéma européen et des avant-premières. Le Blog du Cinéma y sera à partir de demain pour trois jours, histoire de vous faire partager quelques moments de ce festival convivial et décidément éclectique.

Comme tous les ans, le Arras Film Festival nous gâte en nous invitant à découvrir plusieurs avant-premières en présence des réalisateurs/trices (écriture inclusive oblige !) parmi lesquelles Borg Mc Enroe de Janus Metz, A beautiful day de Lynne Ramsay avec Joaquin Phoenix, La douleur d’Emmanuel Finkiel adapté du roman éponyme de Duras, Je vais mieux du discret Jean-Pierre Améris (Les émotifs anonymes), La promesse de l’aube d’Eric Barbier, tiré du roman de Romain Gary et Thelma du très talentueux Joachim Trier (Olso 31 août).

Le Arras Film Festival offre aussi un beau panorama sur le cinéma européen avec une douzaine de films présentés dont un focus sur le cinéma allemand et bien sûr une compétition européenne avec un jury présidé cette année par Christian Carion, enfant du pays et réalisateur de Mon garçon sorti en septembre.

J’ai même rencontré des Tziganes heureux d’Aleksandar Petrović

Toujours dans le cinéma européen, on pourra découvrir la sélection annuelle Visions de l’est et avoir le bonheur de voir J’ai même rencontré des tziganes heureux qu’on avait manqué au Festival Lumière 2017.

Le cinéma du monde est aussi à l’honneur avec Les bienheureux de Sofia Djama, le film chilien Mariana de Marcela Said ou le film palestinien Wajid de Annemarie Jacir.

Cette édition rendra hommage à Noemie Llovsky autour de huit de ses films  en tant que réalisatrice et actrice, ainsi qu’un hommage à l’immense Jean Douchet, critique et historien du cinéma mythique avec un documentaire qui lui est consacré Jean Douchet, l’enfant agité.

Marie-Octobre de Julien Duvivier

Côté rétrospectives, les Festival se penche sur Les révolutions russes avec notamment un ciné-concert du chef d’oeuvre Octobre d’Eisentein et sur les films de crimes avec la rétrospective Whodunit ? (Qui a commis le crime ?) dans le cadre de laquelle sera diffusée Marie Octobre de Duvivier,  L’assassin habite au 21 de Clouzot et Le crime de l’Orient express de Sydney Lumet. L’occasion de rendre hommage à Danielle Darrieux dans un de ses plus beaux rôles et à Clouzot à l’honneur dès le 8 novembre à la Cinémathèque française.

Egalement une carte blanche est donnée aux soeurs Noguera (Lio et Helena)  dès demain avec La clinique de l’amour du regretté Artus de Penguern et Belgian disaster. Samedi soir aura lieu une rencontre animée par Jean Marc Lalane suivi d’un show case.

Enfin à l’occasion de l’exposition Napoléon au Château de Versailles d’Arras, le Arras Film Festival projette plusieurs films sur Napoléon et la campagne de Russie dont l’hilarant Guerre et amour de Woody Allen.

DANIELLE DARRIEUX L’ETERNELLE

C’est une mémoire du cinéma à elle toute seule, elle a tourné avec Billy Wilder, Max Ophüls, Julien Duvivier, Henri Decoin et Paul Vecchiali : Danielle Darrieux vient de fêter ses 100 ans le 1er mai.

Née à Bordeaux en 1917, elle passe son enfance à Paris élevée par sa une mère mélomane trop tôt devenue veuve. A l’âge de 14 ans, elle se présente à un casting pour Le Bal de Wilhelm Thiele, est retenue et démarre ainsi le début de sa longue carrière sans n’avoir jamais pris le moindre cours de théâtre. Les seuls cours qu’elle connait sont les cours de chant de sa mère et Danielle Darrieux chantera dans presque tous ses films. Elle raconte à ce propos que pour elle le cinéma c’était aussi chanter une chanson à un moment donné ! Au départ on lui confie surtout des rôles d’ingénues qui ont conquis le public mais en 1935, année où elle épouse le réalisateur Henri Decoin, Anatole Litvak lui donne son premier grand rôle dramatique avec Mayerling. Le film rencontre un tel succès qu’Hollywood ouvre ses portes à la jeune comédienne. Elle signe un contrat de sept ans avec les studios Universal qu’elle rompt assez vite pour rentrer en France. Elle reviendra cependant ponctuellement à Hollywood notamment pour interpréter en 1952 la comtesse Anna Staviska dans L’affaire Cicéron de Joseph Makiewicz. A son retour en France, elle tourne trois autres films avec Henri Decoin dont l’excellent Abus de confiance qui feront d’elle l’un des comédiennes les plus populaires de l’époque.

Mayerling d’Anatole Litvak (1935)

Les années de guerre seront marquées par son divorce avec Henri Decoin duquel elle restera très proche malgré tout, son remariage avec un ambassadeur de République Dominicaine soupçonné d’espionnage qui vont la contraindre à tourner sous contrat avec la Continental – le studio allemand du cinéma français alors sous l’occupation – afin d’éviter des représailles sur son mari et un exil forcé à la fin de la guerre. C’est Claude Autant-Lara qui la remet en selle avec Occupe toi d’Amélie en 1949.

En 1950, Danielle Darrieux tourne pour la première fois sous la direction de Max Ophüls (La ronde) avec qui elle tournera deux autres films majeurs qui resteront peut être ses plus grands films : Le plaisir et Madame de. Femme infidèle dans La ronde, prostituée dans La maison Tellier (l’un des trois épisodes du Plaisir), frivole, dépensière et éperdument amoureuse dans Madame de, « l’ingénue du cinéma » prouve une nouvelle fois avec Ophüls son grand talent de comédienne. Dans Madame de elle incarne un personnage qui court à sa perte et dont les mensonges répétés l’éloignent du seul homme qu’elle n’ait jamais aimé. La futilité de son existence la rattrape mais il est déjà trop tard. Madame de, incontestable chef d’oeuvre, dénonce à une simple paire de boucle d’oreilles toute la vacuité et la cruauté d’une société faite d’apparence et de tromperie.

Madame de de Max Ophüls (1953)

En 1952, elle retrouve Henri Decoin dans l’un de ses films les plus noirs, La vérité sur Bébé Donge aux côtés de Jean Gabin en mari détaché, et tourne avec les grands réalisateurs de l’époque : Julien Duvivier pour qui elle campe une ancienne résistante dans Marie Octobre, Marc Allégret (L’amant de Lady Chatterley), Gilles Grangier (Le désordre et la nuit), Sacha Guitry (Si Paris nous était conté), Claude Autant-Lara (Le rouge et le noir).

Si à la fin des années 50, les cinéastes de la Nouvelle vague balaient bon nombre de ces réalisateurs en les taxant de faire un « cinéma de papa », ils restent néanmoins fidèles à l’actrice fétiche du cinéma français, notamment Claude Chabrol qui la choisit dans son Landru et surtout Jacques Demy pour qui elle devient Yvonne Garnier la maman des jumelles les plus légendaires (Les Demoiselles de Rochefort). Elle prête d’ailleurs à nouveau son talent de chanteuse au film en interprétant elle-même les morceaux. Quinze ans plus tard, c’est elle qui sollicitera Jacques Demy pour lui proposer d’incarner le rôle de la baronne Langlois, pour la plus grande joie du réalisateur, heureux de retrouver son « stradivarius ».

Les Demoiselles de Rochefort de Jacques Demy (1967)

Le cinéma est souvent cruel avec les actrices qui passent un certain âge en ne leur offrant plus de rôles intéressants, en particulier à Hollywood qui semble attribuer une date de péremption aux actrices de plus de 40 ans. Combien parmi elles doivent se battre pour continuer d’apparaitre au cinéma ? Il n’y a qu’à se rappeler la détermination de Joan Crawford et Bette Davis pour s’en convaincre (comme le raconte très bien l’excellente saison 1 de Feud).
Danielle Darrieux, elle, semble être éternelle et en 2001, elle fête ses 70 ans de carrière avec Huit femmes de François Ozon où elle incarne à nouveau la mère de Catherine Deneuve. Elle a toujours fait preuve de flair pour choisir ses films y compris dans la dernière partie de sa carrière. Dans les années 80, elle retrouve Paul Vecchiali en 1983 En haut des marches, vingt ans après sa courte apparition dans Les petits drames. Elle tourne aussi avec André Téchiné (Le lieu du crime), Benoit Jacquot (Corps et biens) et Claude Sautet (Quelques jours avec moi) puis par la suite avec Jeanne Labrune ou Anne Fontaine et prête sa voix à la grand mère de Marjane Satrapi dans Persepolis.

En haut des marches de Paul Vecchiali (1983)

Danielle Darrieux c’est aussi une immense carrière au théâtre et à la télévision, une présence lumineuse, une voix haut perché, un rire charmant, un regard pétillant et un bonheur de vivre éclatant . En 80 ans, elle a su conquérir le coeur du public comme des plus grands cinéastes passés et présents. Désormais recluse dans sa maison du Golfe du Morbihan, Danielle Darrieux confie que le secret de sa longévité ne tient qu’à une seule chose :  » Je ne pense pas aux années qui passent, je ne me sens pas vieille. » Quand on vous dit qu’elle est immortelle.